Les lieux sociaux dans lesquels intervient Enda Diapol sont marqués par des évolutions politiques décisives. Depuis le début des années 2000, l’espace sous-régional ouest-africain s’est progressivement pacifié. Des conflits de haute intensité l’ont secoué durant la décennie 1980-90. Notamment dans les pays de la Mano River Union (Liberia, Sierra Leone et Guinée). Le jeu démocratique autour duquel s’organise, de plus en plus, la lutte pour la conquête du pouvoir a contribué à la stabilité, dans d’autres pays de l’espace.
Des menaces pèsent cependant sur les Etats, ainsi que sur les efforts de construction et de consolidation de la démocratie. La résurgence de conflits irrédentistes et la menace terroriste préoccupent tous les acteurs. Ces menaces restent liées à la fragilité de ces états face à la crise économique et financière mondiale. Les réformes constitutionnelles et institutionnelles se multiplient aussi, qui déconsolident plus qu’elles ne consolident les processus démocratiques. Les tensions politiques qui découlent de ces manœuvres restent grosses de dangers, comme en attestent les crises pré et post électorales qui remettent en cause des acquis démocratiques dans plusieurs pays.
Une des parades à de telles dérives repose sur cette forme de gouvernance mondiale qui s’exerce à travers la veille, les pressions et les nouvelles normes d’«ingérence positive» qu’exerce la communauté internationale. Les organisations de la société civile, au niveau national, sous-régional et continental jouent un rôle important dans cette dynamique.
Certaines tendances lourdes seraient à prendre en charge :
– l’accroissement des interdépendances est inévitable. Mais si l’intégration inter-africaine s’avère incontournable, elle semble ne pouvoir prendre pied dans l’histoire contemporaine qu’à la condition de déployer en même temps des dynamiques d’intégration intra-nationale. Car, paradoxalement, le développement de nouvelles relations entre les pays passe par le développement d’une intégration propre à chaque Nation.
– la mondialisation des marchés et la marchandisation du monde en Afrique, comme ailleurs, ne lèvent nullement le pas. L’illusion marchande s’y révèle vivace, provoquant des ravages similaires dans les modes de vie, mettant en balance les valeurs et les solidarités traditionnelles.
– la crise des institutions publiques et des autorités établies n’est un secret pour personne en Afrique ;
Tout cela ne fait que souligner le défi majeur que constitue la construction d’espaces véritablement publics. Les États sont bien souvent encore plombés par les héritages de l’histoire.
– enfin, les enjeux culturels et la réinvention des identités constituent deux chantiers particulièrement ardus dans un continent où un citoyen sur deux a moins de vingt ans.
Et pourtant siège à cet endroit un défi majeur : se créer de nouvelles manières de gouverner, d’être et de faire ensemble doit aller de pair avec l’émergence de nouvelles façons de se gérer soi-même (citoyenneté active, autonomie, responsabilité).
Ainsi Enda Diapol est engagée dans l’amélioration de la gouvernance des institutions et de la régulation des sociétés. A partir de ses recherches de terrain et des analyses de contexte qu’elle a pu en tirer, Enda Diapol a identifié des mécanismes récurrents qui engendrent la pauvreté, mais aussi des possibilités de réponses à ces dysfonctionnements par les sociétés ouest-africaines elles-mêmes.
La pauvreté, la plus visible, est la pauvreté économique. Il est une autre dimension de la pauvreté, liée à la première : il s’agit de la pauvreté sociale. La dégradation des conditions de vie entraîne une fragilisation des liens sociaux traditionnels : familles fractionnées, solidarité communautaire plus aléatoire, accentuée par l’exode rural ou l’émigration, repli des corporations sur elles-mêmes, multiplication des sectes religieuses où les individus cherchent un refuge. Mais pour Enda Diapol, la pauvreté est avant tout une pauvreté politique, en ce que la majorité des citoyens est exclue économiquement et socialement de la définition des règles du jeu.
Face à ces pauvretés économique, sociale et politique intrinsèquement liées, dont les mécanismes sont aussi bien locaux que macro, Enda Diapol promeut un changement politique et une modification de l’ordre social, qui permettrait de remettre au cœur de la société des valeurs telles que la solidarité, la justice sociale et l’épanouissement de toutes les composantes de la société. Tel est, de son point de vue, le véritable enjeu du développement.